jeudi 3 décembre 2009

DESSEIN INTELLIGENT

Comme je vous expliquait quelques uns veulent que ça soit une théorie scientifique. Qu’en pensez vous ?
À la différence des créationnistes traditionnels, nombre de promoteurs du dessein intelligent ( Intelligent Design ou ID) sont des universitaires établis. Ils mettent en avant leur appartenance au milieu académique pour présenter leur théorie comme alternative au darwinisme. Et ils publient pléthore d'ouvrages.Trois auteurs ouvrent le feu en 1984 avec The Mystery of Life's Origin (publié par la Foundation for Science and Ethics). Charles Thaxton, docteur en chimie, a suivi des études d'histoire des sciences à Harvard et de biochimie à Brandeis, Walter Bradley, ingénieur en science des matériaux, est professeur à l'université du Texas, et Roger Olsen, géochimiste, est vice-président d'une société de conseil. Dans leur essai, ils suggèrent que seule une intelligence supérieure peut avoir généré le code génétique. S'ensuit en 1989 la publication - coordonnée par Thaxton et financée par la même fondation chrétienne conservatrice - du manuel Of Pandas and People destiné à introduire la théorie dans les écoles. Puis un professeur de droit à Berkeley, Philip Johnson, sort, en 1991, Darwinism on Trial, qui va propulser l'ID sur le devant de la scène.
Toujours en 1991, le même Johnson (aujourd'hui à la retraite) participe à la création à Seattle du Discovery Institute, un Think Tank financé en partie par des Églises fondamentalistes. En 1996, l'institut se dote d'un centre de recherche dédié au dessein intelligent, le CSC (Center for Science and Culture), dirigé par le géophysicien et historien des sciences Stephen Meyer. La même année, le biochimiste Michael Behe, professeur à l'université de Lehigh en Pennsylvanie, devenu l'un des leaders du mouvement, publie Darwin's Black Box (Free Press) ; l'ouvrage est suivi en 1998 par The Design Inference (Presses universitaires de Cambridge) du mathématicien et théologien William Dembski. Depuis, les essais foisonnent, mais les articles scientifiques tentant d'accréditer l'ID brillent par leur absence.
Pourtant, les tenants du dessein intelligent sont bien des néocréationnistes. Certains le dissimulent, comme Behe et Dembski. Chrétiens pratiquants, ils se gardent de toute référence à Dieu ou à la Bible afin que leur théorie apparaisse comme une science. Mais ils prétendent que le vivant est si complexe que seul un « designer intelligent » peut l'avoir conçu. D'autres affirment leur engagement évangélique. Tel Philip Johnson, qui n'hésite pas à déclarer : « Notre but ultime est d'affirmer que Dieu existe et de combattre Darwin. » M.-L. T.
TURQUIE : Le croissant et le singe
Loin d'être l'apanage des Églises protestantes américaines, le créationnisme scientifique fait aussi bon ménage avec les courants fondamentalistes islamiques. Selon Jacques Arnould, prêtre dominicain, spécialiste des rapports entre la théologie et la théorie de l'évolution, le cas de la Turquie est exemplaire. C'est l'un des rares pays à la population majoritairement musulmane à être laïque, démocratique et ouvert sur l'Occident. Pourtant, la Turquie est devenue une terre d'élection du créationnisme islamique. Comment l'expliquer ?
Historiquement, l'Islam a plutôt bien toléré Darwin. Il l'a même en quelque sorte récupéré, considérant l'évolution comme une action divine. Certains zélotes sont allés jusqu'à juger le Coran plus darwinien, donc plus scientifique que la Bible. Or, en Turquie, avec le coup d'État militaire de 1980, qui a porté au pouvoir des musulmans très actifs, le ton a changé. Les intégristes turcs ont enfourché le cheval de bataille de l'anti-évolutionnisme pour servir leur discours politique.
Une Fondation pour la recherche et la science, le Bav (Bilim Arastima Vakfi) est née en 1991 dans la mouvance des courants fondamentalistes, conduits entre autres par le sénateur Necmettin Erbakan. Son principal objectif est de faire disparaître la théorie de l'évolution de l'enseignement turc. Ses moyens d'action s'apparentent à ceux du créationnisme américain : conférences, publications d'essais, distributions de brochures. Elle a d'ailleurs noué des contacts avec l'Institute for Creation Research (ICR) qui lui fournit des documents et des argumentaires. Mais son discours est plus extrémiste : Allah est grand, et Darwin est un imposteur ! Le Bav n'en est pas au « dessein intelligent ». Le Coran est la référence scientifique ultime : puisque le texte n'évoque pas l'évolution, c'est qu'elle n'existe pas. Les récents ouvrages soutenus par le Bav sont signés par un certain Hârun Yahya - un pseudonyme sous lequel se cache peut-être N. Erbakan. Darwin y est présenté comme le satan qui a conduit les sociétés modernes au bord du gouffre. Tout simplement...
M.-L. T. publié à la recherché avril 2006

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